Le mercredi 18 novembre, lors du sommet européen consacré à la coordination sanitaire des 27 face à la Covid-19, la Hongrie et la Pologne ont fait valoir leur droit de veto. Deux jours plus tôt, elles annonçaient déjà leur désaccord face au budget de l’UE et autre projet de relance. Rapidement suivies par la Slovénie, ces démocraties illibérales paralysent le budget de l’UE. Un blocage qui fait grincer des dents.
Revenons sur les faits. Le 21 juillet dernier, les chefs d’État et de gouvernement européens s’accordaient autour d’un plan de relance exceptionnel de 750 milliards d’euros pour surmonter la crise de la Covid-19. Ce nouvel instrument nommé « Next Generation EU » devait être financé par un endettement commun des États membres et son application votée à une unanimité requise. Le plan de relance devait financer des programmes nationaux dans l’ensemble des États membres, sous forme de subventions et de prêts.
Et la France dans tout ça ? Elle devait recevoir près de 40 milliards d’euros pour alimenter son plan de relance, sobrement nommé « France relance ». Ce dernier s’élèverait à 100 milliards d’euros et servirait à financer 70 mesures autour de trois piliers : la transition écologique, la compétitivité et l’innovation ainsi que la cohésion sociale et territoriale.
Pourtant, le plan de relance est aujourd’hui paralysé. À noter que la situation sanitaire n’a rien arrangé. Régler un contentieux aussi complexe par un appel visio de 16 minutes semblait perdu d’avance.
La cause du blocage : une définition ambiguë de l’État de droit. Sans surprise, la Hongrie et la Pologne, très vite rejointes par la Slovénie, ont refusé ce mercredi 23 novembre que le versement des fonds européens soit conditionné au respect de l’État de droit. Rien de nouveau sous le soleil pour ces fervents opposants à l’indépendance de la justice et des médias.
Quelles sont les conséquences de ce blocage ? Le budget de l’UE est dès lors paralysé. En outre, il fait passer au second plan la lutte contre l’épidémie, alors qu’elle était censée être le point d’orgue du sommet.
Quels sont les risques de ce blocage ? Omettant les contentieux diplomatiques et la crédibilité de l’union en péril, il y a urgence. Certains citoyens européens, les plus touchés par la crise, attendent les fonds européens de pied ferme. Un vrai risque de mouvements sociaux n’est pas anecdotique. On en a déjà vu à Turin et à Barcelone.
Quelles sont les solutions envisagées par les 25 ? Il s’agit d’une part, d’engager le dialogue avec Varsovie et Budapest et de leur faire comprendre que la balle est dans leur camp. Dans les chancelleries, on réfléchit aussi aux moyens d’exercer une pression sur les réfractaires. En leur faisant porter la responsabilité du délai d’un plan de relance attendu ardemment dans l’UE, d’abord. En leur faisant sentir leur isolement, ensuite. Certains évoquent même du bout des lèvres un scénario plus radical : un plan de relance à 25. À ce stade, la solution sert surtout d’épouvantail, tant elle serait lourde dans sa mise en œuvre autant que dans ses conséquences politiques.
Qu’en pensent les 25 ? Leur marge de manœuvre est assez limitée. La chancelière allemande Angela Merkel est d’avis que la Hongrie et la Pologne vont finir par céder, d’autant qu’elles figurent parmi les plus gros demandeurs d’aides de l’union. Mais si la situation ne s’arrange pas d’ici le 10 décembre (date du prochain sommet européen), certains pensent déjà à exclure les réfractaires du plan de relance.
Rédaction : Mathilde Kerautret
Relecture : Nicolas Quéval
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